Rencontre avec les académiciens du Goncourt

Cinq membres de l'Académie du Goncourt qui débarquent à Genève...

Voilà une bonne excuse pour prendre congé une après-midi, ce d'autant plus que j'accumule les heures supplémentaires. Plus d'hésitation, je file dans le train direction La Comédie de Genève pour cette rencontre exceptionnelle organisée par la Société de Lecture à l'occasion de son bicentenaire.

Comment devient-on juré du prix littéraire le plus convoité de France? Tel était le thème de cette rencontre qui a donc réuni Bernard Pivot, Philippe Claudel, Pierre Assouline, Tahar Ben Jelloun et Eric-Emmanuel Schmitt. Les membres restants n'ayant pu se libérer ou étant bloqués par les grèves, c'est à ces cinq messieurs qu'est revenu la tâche de nous dévoiler les arcanes du Goncourt. Petit regret concernant l'absence de Virginie Despentes, que j'aurais bien voulu voir aux côtés de Bernard Pivot, mais ne faisons pas la fine bouche...


Premier conclusion: l'Académie du Goncourt, créée il y a une centaine d'année en opposition à l'Académie française, reste sa meilleure ennemie. Une partie de la discussion a ainsi été consacrée à la différence entre les deux honorables institutions: Postulation pour l'Académie française contre Nomination pour l'Académie Goncourt, fauteuil contre couvert, 40 membres contre seulement 10, taux de mortalité annuel élevé des immortels contre club d'amis se voyant chaque mois de l'autre etc. Schmitt a ainsi résumé cette opposition en décrivant l'Académie française comme une institution qui flatte l'ego alors que le Goncourt flatte les autres!
On a aussi appris que Tahar Ben Jelloun avait postulé à l'Académie française et devait très certainement y être élu, jusqu'à ce que Valerie Giscard d'Esteing s'intéresse au même siège, celui de Léopold Sédar Senghor. Pas de regrets cependant: quelques années plus tard, l'Académie Goncourt le contacte et il rejoint les 10 en même temps que Patrick Rambaud, faisant dire à Pivot que le Goncourt n'est pas raciste, vu qu'il a intégré "un nègre [littéraire]et un arabe en même temps". Assouline a également expliqué qu'intégrer le Goncourt lui avait permis de tutoyer pour la première fois Pivot, son supérieur pendant 20 ans à la rédaction de Lire.

Chacun nous a décrit leur nomination à l'Académie Goncourt. Vous saurez ainsi que Philippe Claudel a appris la nouvelle en faisant la vaisselle, que Despentes aurait simplement dit "super" et que Bernard Pivot a été appelé durant l'enterrement d'un ami proche. Au final, tous ont souligné la joie et l'honneur que leur procure cette tâche mais aussi la charge de travail et les heures passées à lire les autres. Pivot a également expliqué qu'il ne s'était jamais vu à l'Académie française, "avec costume et discours sur la vertu" mais qu'il ne pensait pas non plus pouvoir intégrer le Goncourt en raison de son statut de journaliste. Il pensait de plus en être à jamais privé en raison de ses brocardes contre les magouilles du Goncourt et fut donc très étonné de se voir proposer un couvert... Sous sa présidence, il est toutefois reconnu que les arrangements entre éditeurs ne sont plus la norme.

La dernière partie de la conférence s'est concentrée sur les liens de chacun avec la Suisse et surprise, plusieurs d'entre eux sont des fins connaisseurs de l'Helvétie, de ses habitants et ses écrivains. Crans Montana, un peu mise à mal ces derniers mois, serait ainsi contente d'avoir été mentionnée par plusieurs d'entre eux. J'ignorais également qu'Assouline enseignait à l'ETHZ, que Claudel était un fan d'alpinisme, de l'oeuvre de Dürrenmatt et de Maurice Chappaz mais également des vins de Marie-Thérèse Chappaz. Enfin, la Suisse pour Pivot s'est principalement Martigny, théâtre de son premier flirt d'adolescent, mais aussi des références à des entretiens littéraires marquants de sa carrière avec Nabokov et Cohen.


Au final, un évènement fort sympathique, au succès mérité. On aurait tous bien aimé que cela dure un peu plus longtemps. 

Et vous, êtes-vous plutôt Académie française ou Académie Goncourt?



Commentaires

  1. Merci pour ton billet, j'en apprends beaucoup. 5 homems se sont déplacés, les dames n'ont pu arriver cause grèves? Je suppose cependant qu’elles sont plus nombreuses à l'académie goncourt qu'à l'académie française?

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    1. Ha ha ha, sauf erreur 5 femmes sur 40 à l'Académie française et 3 sur 10 au Goncourt. Je te laisse faire le calcul. Bon, on reste encore loin de la parité.

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  2. Plutôt sympa comme idée de rencontre. Je vais accompagner mes élèves dans l'aventure du Prix Goncourt des lycéens dès septembre et j'en suis ravie !

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    1. Le Goncourt des lycéens, ça a doit être très sympa comme aventure. Tu nous raconteras sur ton blog?

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