39 rue de Berne de Max Lobe

Depuis sa cellule de prison, Dipita raconte le récit de sa vie et de ses origines. Il évoque à la fois la jeunesse de sa mère, Mbila, envoyée à 16 ans en Europe afin de venir en aide à sa famille, son enfance auprès de cette dernière, devenue prostituée à Genève, les vacances passées au Cameroun auprès de son oncle, sa découverte de l'amour jusqu'à l'acte de folie qui l'a condamné à cet enfermement. 

39 rue de Berne est le deuxième roman du jeune auteur camerounais, Max Lobe, aujourd'hui établi à Genève. C'est un récit à la fois très africain dans sa construction, proche de la fable, et dans son style parlé parsemé d'expressions camerounaises savoureuses; mais c'est étrangement, un roman très Genevois aussi, centré sur le fameux quartier chaud des Pâquis, et qui reflète au final parfaitement cette facette moins connue de la ville du bout du lac.

J'ai trouvé un côté très humain dans ce récit, sur un sujet et un quartier qui se résument bien souvent à des statistiques dans les journaux. J'ai aimé plonger dans la vie des "filles du Pâquis", et imaginer avec l'auteur leur quotidien en dehors de la rue, à élever des enfants et à boire des cafés avec des amies histoire de vider leur sac. J'ai également trouvé intéressantes toutes les thématiques traitées, que ce soit la perception de l'homosexualité en Afrique, l'immigration clandestine, le trafic d'êtres humains ou celui de la drogue. Tout ça peut paraître très sombre, mais Max Lobe aborde ces destins tragiques de manière plus souvent drôle que violente, tout en restant percutante et crédible. L'intrigue s'éparpille quelque fois et les personnages auraient pu être un poil plus étoffés, mais j'ai, dans l'ensemble, suivi l'auteur avec plaisir derrière les façades et néons de la rue de Berne. 

Petit bémol par contre pour mon exemplaire, où j'ai relevé plusieurs coquilles, alors que d'habitude, je n'ai vraiment pas le syndrome du crayon rouge. 

Un roman réussi, mêlant une culture africaine à un contexte bien genevois. J'ai apprécié ce mélange détonnant et l'humanité qui se dégage du récit. Ce n'est pas parfait, mais c'est de très bonne augure dans la jeune carrière de cet auteur. Une nouvelle voix aussi africaine qu'ouverte sur le monde.  

A 16 ans, la mère de Dipita atterrit du Cameroun en Europe, où elle est brutalement plongée dans le monde de la prostitution. Depuis, elle se débrouille. Sa naïveté, sa générosité et sa beauté lui permettent de survivre, malgré un "camion de haine dans son ventre". 
Elle raconte sa vie à Dipita, qui aime autant l'écouter que lui couper la parole pour continuer l'histoire lui-même. Dipita aime aussi son oncle et sa manière de vitupérer à longueur de journée les huiles de son pays, même si c'est lui qui a jeté sa mère dans les filets des "Philantropes-Bienfaiteurs". Dipita aime encore celles qu'il appelle "ses mères" ; elles participent à son éducation, aux commérages et aux réunions de l'AFP (association des filles des Pâquis) et elles accepteront de manière déconcertante que leur petit Dipita devienne comme ça. 
Dans une langue haute en couleurs et inventive, le narrateur décrit avec finesse aussi bien la réalité des Africains sans papiers que les paradoxes et les souffrances d'un tout jeune homme noir et homosexuel.

Je remercie Emmanuelle et les éditions Zoé pour l'envoi de ce livre. Un souci de poste a fait atterrir deux exemplaires de ce livre dans ma boîte aux lettres. Je me propose donc d'envoyer le deuxième à un ou une blogueuse qui s'engage à en faire un billet dans un délai raisonnable. Pour cela, laissez-moi un commentaire ci-dessous ou envoyez-moi un mail. Si plusieurs personnes sont intéressées, je procéderai à un petit tirage au sort.

LOBE Max, 39 rue de Berne, ed. Zoé, janvier 2013, 192p. 

Commentaires

  1. Un mélange des genres pour le moins étonnant mais qui a l'air de bien fonctionner.

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  2. Ton article m'intéresse car j'aime découvrir de nouvelles plumes. Je veux bien participer au tirage au sort ! (sinon, un petit tag t'attend chez moi, si tu en as envie)

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  3. ça me semble original , du coup je le note.
    Merci Zarline :)

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  4. @Alex: Ca fonctionne bien en effet, même si le livre n'est pas sans défaut. Serais-tu intéressée à le recevoir?

    @Philisine: Je file voir ce tag et je note ton intérêt pour le livre et je te tiens au courant la semaine prochaine...

    @Une Comète: Pareil que pour Alex, serais-tu intéressée à le recevoir?

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  5. Bonjour,

    la librairie francophone vient de parler de cet auteur et de son roman "39, rue de berne". Ce que j'ai entendu et votre petit article me donnent envie de le découvrir. Si vous aimez la littérature "africaine" je vous conseille Kossi Efoui qui a une plume que je qualifierai de "totémique" et qui dépeint un univers très poétique et un autre auteur américain d'origine éthiopienne Dinaw Mengestu qui lui a une plume qui me fait penser à un bouton de rose qui éclos pétale par pétale...Mais peut être les connaissez vous.

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  6. @Frédéric: J'espère que depuis votre commentaire, vous avez eu l'occasion de découvrir ce livre. Concernant les auteurs africains que vous citez, non, je ne connaissais ni l'un, ni l'autre mais après quelques recherches, j'avoue être très tentée par les deux. Merci donc pour la découverte, j'espère avoir l'occasion de les lire très vite.

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