Shot in the heart (Un long silence) de Mikal Gilmore

Gary Gilmore: ce nom vous dit peut-être quelque chose... bien qu'il soit aujourd'hui difficile d'imaginer un temps où la peine de mort n'était plus appliquée aux États-Unis.

Gary Gilmore est en effet connu pour être le premier homme exécuté aux États-Unis en 1977, après une pause de 10 ans. La peine de mort venait d'être rétablie en 1976 et Gary Gilmore, condamné pour un double meurtre, fit le choix volontaire d'interrompre tout recours judiciaire et de demander que la peine soit exécutée au plus vite par peloton d'exécution. Ces évènements eurent un fort retentissement à l'époque, faisait de Gilmore un personnage presque "culte" avec films sur sa vie, tube punk (voir en fin d'article), et romans, dont ce Shot in the heart. Mais imaginez un peu que ce fameux meurtrier soit votre grand frère...

Loin d'un récit voyeur de bas étage, Shot in the heart est le témoignage touchant d'un homme cherchant à comprendre le destin tragique de sa famille brisée. Dans un exercice plein de sincérité et de transparence, Mikal Gilmore tente de retracer la source du mal, le moment précis où tout a dérapé. Est-ce dans l'éducation violente de leur père? Dans le mariage tumultueux de leurs parents? Dans le passé trouble et criminel de leur père? Dans ces questions d'identité et d'origine restées troubles et secrètes?  Ou même plus loin, dans le passé et l'identité Mormone, adepte du sang versé, hérité de leur mère?

Comme vous vous en doutez, Shot in the heart n'est de loin pas une lecture 'feel good', à moins qu'elle vous fasse relativiser vos petits tracas quotidiens. Mais c'est une lecture forte, honnête qui interroge immanquablement sur l'égalité des chances, les privilèges de notre naissance, le rôle de la famille, l'impact de la prison. Est-ce que Gary Gilmore aurait pu être sauvé? Il est difficile d'en être certain à la lecture de ce récit, où le tourbillon de la violence de l'enfance et de la délinquance se referme petit à petit comme un étau qui ne laissera ainsi que peu de chance de rédemption.

Un roman coup de poing et un coup au cœur très certainement!!!

Gilmore, un nom entaché du sceau de la malédiction aux États-Unis. En 1976, le fils aîné, Gary, en prison pour meurtre, exige que l’Utah rétablisse la peine capitale. Cinq balles lui arrachent le cœur. Mikal, le cadet, veut comprendre. Il enquête sur sa famille, berceau de haine, violence et folie, enracinée chez les mormons, et en dévoile les secrets infâmes, comme une tentative pour exorciser le Mal.

Né en 1951, Mikal Gilmore est rédacteur en chef de Rolling Stone Magazine. Un long silence, la biographie de sa famille, a remporté le National Book Critics Circle Award. Norman Mailer s’est inspiré de cette histoire pour écrire Le Chant du bourreau (prix Pulitzer 1981).

GILMORE, Mikal, Shot in the heart, ed. Penguin, 1994, 568p. 
GILMORE, Mikal, Un long silence, ed. Points, février 2012, 624p.  

Commentaires

  1. Bonjour,
    as-tu lu Le chant du bourreau de Norman Mailer? Il raconte justement l'histoire de Gary Gilmore.
    Je l'ai trouvé passionnant (peut-être plus que celui-ci de Mikal; que j'étais quand même contente de découvrir).
    Si ça t'intéresse.... j'en ai parlé là (https://marquetapage.com/2010/10/le-chant-du-bourreau-norman-mailer/)

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    1. Je pense en effet lire un jour le Norman Mailer, ou au moins regarder le film. Mais je ne crois pas avoir envie d'enchainer les deux, histoire de garder les deux voix un peu séparées. Avais-tu lu les deux à la suite?

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    2. Je viens de revoir sur le blog, j'ai lu le Mailer en 2009 et le Mikal Gilmore en 2012 (quand il est sorti en fait)... donc oui c'est espacé.
      ooh baah c'est pas une obligation de lire les deux ;-)
      Je n'ai pas vu le film par contre.

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  2. J'avais beaucoup aimé également. J'ai prévu de lire le livre de Norman Mailer depuis, mais je n'ai toujours pas pris le temps de le faire.

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    1. De fait, c'est une fameuse brique! Han d'en parler, je crois que ça me donne envie de le reprendre en fait.

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    2. Ici, plus que l'histoire même de Gary Gilmore, j'ai trouvé passionnant le travail de recul de l'auteur par rapport à sa famille, ainsi que sa présentation d'un criminel comme un grand frère, comme quelqu'un qui vit sous le même toit, avec qui on partage des souvenirs, des Noël.
      Je crains un peu le côté un peu voyeur du Norman Mailer, peut-être à tort...

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  3. Une lecture bien tentante, et tant pis pour le feel-good.

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    1. C'est clair que ça ne respire pas la joie de vivre mais c'est un beau livre quand même.

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  4. Aaah comme ça, je ne me serais pas forcément précipitée mais c'est le genre de sujet qui peut me parler et me toucher quand même (il n'y a pas que le feel good qui peut bouleverser^^) et si tu en fais un roman coup de poing, je me dis que ça doit vraiment valoir le détour.

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    1. C'est clairement un récit qui ne laisse pas indifférent. J'ai toujours tendance à penser que chaque personne peut, avec de la volonté, changer de vie. C'est mon petit côté optimiste. Mais là, quand même, difficile de voir comment Gary Gilmore aurait pu s'en sortir. Peut-être que cela se joue à quelques moments clés. Le réaliser m'a pas mal fait cogiter.

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